© Jean-Marc Tingaud
Le décor est là, sobrement, qui pose et qui compose. Loin du tumulte, loin des cahots et du chaos du monde. La lumière, doucement, coule. La photo sur le mur - le mur qui imperceptiblement se lézarde et fissure - semble inéluctablement punaisée. Des objets, çà et là. Rien ne bouge.
Alors subtilement, le dessein se dessine. D'abord, un écho lointain, puis une réminiscence. Je saisis ce qui se trame : un fil ténu vient tisser des liens et des correspondances. Naples, Zagreb, Marrakech, Jérusalem… L'objet anodin, une fois exhumé par le photographe, perd son insignifiance. L'intérieur se dévoile et laisse présager un peu de son secret. Un peu de ceux qui y vivent, aussi. L'image dit le temps, le temps qui passe, celui qui reste, celui qui se consume. Elle incarne une bribe de la mémoire du lieu et de ce qui l'imprègne. Jean-Marc Tingaud, en évoquant l'espace de l'intime, invoque l'empreinte et la résurgence. Avec pudeur, avec gravité souvent, les images, épurées et sensibles, suggèrent plus qu'elles ne démontrent. Alors, de ces absences, de ces fragments d'espaces, surgit un bruissement : le murmure, furtif, d'un récit, d'une histoire, parfois même de l'Histoire.
Pas âme qui vive, et pourtant chaque image frémit de la présence tacite de ce qui l'habite.
Intégralité de mon texte paru in Le monde d'Hermès, Paris, 2003.